Samra

Samra

Que savoir du site de Samra en Jordanie ?

Khirbet es-Samra, les églises sorties du sable (1/2)

Khirbet es-Samra, les églises sorties du sable (2/2)

Les publications, où en est-on ?

a) Le site et la géométrie romaine par Gérard Thébault : livre publié :

Sur les pas des arpenteurs romains. Khirbet Samra, vol. 2. La via nova de la Provincia
arabia entre Bostra et Philadelphia , Peeters, Cahiers de la Revue biblique, Series
archaeologica 5, 103, 2022, 215 p.

b) Samra Vol. II : les Niveaux romains. En cours d’achèvement. Numismatique =
L’étude Bauzou doit être contrôlée par B. Callegher = le matériel métallique (Marseille
n’a pas encore accepté. En négociation). Les verres = achevés (attente de mise en
pages). La poterie (JBH, S. Brelaud) = en cours d’achèvement . P. Ballet doit finir le
contrôle des pâtes. (Brepols ed. ou Peeters, ou V&R)

c) Samra Vol III : les niveaux byzantins. Histoire syriaco-protobyzantine (A.
Desreumaux et S. Brelaud). La poterie = JBH, S. Brelaud, P. Ballet (en cours). Les
pavements de mosaïques et les plaques des chancels (V. Blanc-Bijon, Aix et L. de
Lisle) = en bonne voie. Architecture (JBH). Volume en cours d’élaboration (Brepols
ed.).

d) Un niveau médiéval. La mosquée (JBH) à faire . Poterie (C. Monchamp, IFPO) en
cours.

e) Le funéraire du bourg. (A. Nabulsi (Univ. Hambourg). Projet de joindre le mobiler par
l’EBAF JBH). (Peeters ?)

 

 



Khirbet es-Samra, les églises sorties du sable (2/2)

Suite du premier épisode ! Les pierres du désert jordanien ont révélé, certes, onze églises des VIème et VIIème siècles mais pas seulement… Découvrez la théorie sur l’histoire du lieu et les raisons pour lesquelles, chaque été, l’équipe de l’École Biblique et Archéologique Française doit retourner sur place.

Ce que « la Ruine sombre » apporte à l’Histoire

Dans une présentation de la première publication liée à Samra [1] , Paul Géhin (chercheur émérite au CNRS) dit du village qu’il « manque de pittoresque et reflète bien la banalité des sites ruraux des marges semi-arides ». Le lieu, c’est vrai, n’attire pas beaucoup l’œil quand on ne fait qu’y passer. Et les nombreuses ruines ensevelies sont difficilement imaginables pour le badaud. Les fouilles révèleront pourtant, en 30 ans, plus qu’on ne pouvait espérer.

Le fr. Jean-Michel de Tarragon sur les fouilles.

La lecture des dédicaces de certaines églises de Samra a permis d’en dater précisément quelques unes. Elles livrent aussi les noms des évêques consécrateurs vérifiés ou replacés dans la succession épiscopale du diocèse antique. Malgré ces inscriptions, la proximité de ces onze édifices religieux les uns à côté des autres (comme dans la Rihab proche ou à Um er-Rasas, près de Madaba), parfois jumelés, reste aujourd’hui inexpliquée. On parvient, grâce aux inscriptions, à comprendre à quel saint ou défunt chaque édifice est consacré mais leur nombre et la proximité entre chacun d’eux, elles, restent problématiques.

L’hypothèse la plus probable serait qu’à partir de l’an 540, tout l’Orient se vit ravagé à répétition par des épidémies de peste et que les familles touchées pourraient avoir construit les églises en commémoration des victimes. « Il s’agirait de chapelles funéraires, non pas pour enterrer les corps, mais seulement pour y prier pour le repos des âmes » explique fr. Jean-Baptiste Humbert. Le système agglutiné d’habitations en « grappes de raisin » s’expliquerait alors dans l’agglomération, par le maintien de la cohésion des clans puis des familles en quartiers. En effet, aujourd’hui encore, dans une famille bédouine, les enfants mariés construisent leur nouvelle maison dans la stricte proximité des parents. Chaque « famille » aurait eu à cœur d’édifier sa chapelle.

De l’âge du fer à l’époque romaine

Restes de chancels des églises.

Khirbet es-Samra a aussi révélé des restes de périodes aussi reculées que le néolithique ou que l’Âge du Bronze ancien. L’essentiel de l’implantation a été romaine, bien marquée par l’importante collection de monnaies dans l’auberge dite Mansio datée des IIème et IIIème siècles, dont la présence s’explique notamment par le passage tout proche de la voie romaine dite Via Nova qui, sous Trajan (depuis 114), reliait la mer Rouge à Palmyre.

Le cimetière de Samra, dont font parties les stèles funéraires observées par le fr. Savignac en 1924, se démarque des cimetières classiques de la même période dans la région. Paul Géhin [2] explique aussi que celui-ci « présente l’originalité d’avoir été divisé en deux parties (une partie pré-chrétienne et l’autre chrétienne), avec l’usage de deux langues, le grec et l’araméen melkite ; pour cette dernière langue qu’on appelle aussi christo-palestinien, le cimetière représente un cas unique ». C’est bien ce qui avait amené Alain Desreumaux, aujourd’hui lui aussi chercheur émérite au CNRS et toujours directeur de la fouille de Samra, à entreprendre son travail de thèse il y a 40 ans, bien avant la découverte des restes byzantins.

Les étés jordaniens depuis la fin des fouilles

Tessons assemblés et leurs dessins.

Depuis 2009, plus un seul coup de pioche de l’École biblique de Jérusalem n’a heurté la terre de Samra. Les ruines sont protégées du village bédouin voisin, bien ensevelies sous le sable et les pierres. Seuls subsistent les innombrables restes de mobiliers et tessons que notre équipe archéologique revient étudier chaque année entre juillet et septembre, et ce depuis huit ans. L’équipe se compose du fr. Jean-Baptiste Humbert, évidemment, du fr. Jean-Michel de Tarragon, éternel intendant, photographe et chauffeur, et de quelques bénévoles récidivistes parmi lesquels Louis de Lisle et Manon Saenko, spécialisés dans la restauration des poteries. Giacoma Petrullo, post-doctorante italienne spécialisée dans « l’industrie osseuse », s’est jointe à l’équipe pour la première fois cette année. 

Chaque année, l’équipe doit compter sur la générosité des familles expatriées françaises d’Amman pour se loger. L’équipe les remercie ici ! Au cours des premières campagnes de fouilles, les bénévoles se souviennent que les conditions n’étaient pas aussi douces… Ils logeaient alors dans le village bédouin de Samra, côtoyant chaque jour les scolopendres et les scorpions, les températures caniculaires et le sable du désert. Depuis qu’il n’est plus nécessaire de fouiller, c’est le fr. Jean-Michel qui fait jouer ses réseaux en amont pour que tout se fasse le plus confortablement possible, mais dans la capitale. Chaque semaine, l’équipe fait un aller-retour au site pour y redéposer le matériel étudié et y récupérer de nouvelles caisses de matériel.

Encore un effort, encore quelques mois…par an

Manon et Louis en train de macro-photographier.

Les ressources de la documentation découverte à Samra semblent parfois inépuisables. Fin août, l’équipe calculait qu’il avait fallut un mois cette année pour trier, dessiner, photographier et répertorier 1000 tessons de poteries. Par chance, il n’y a plus d’autres cartons au village, et la sélection souhaitée depuis cinq ans est parvenue à son terme. D’après le fr. Jean-Baptiste, on peut encore estimer à un ou deux étés le travail nécessaire pour boucler le dossier de la publication de Khirbet es-Samra et, enfin, offrir à la science les deux prochains volumes prévus sur lesquels les équipes planchent depuis 1981. Courage, chercheurs, courage.

[1] Revue des études byzantines, tome 58, 2000.
[2] Revue des études byzantines, tome 58, 2000.


Khirbet es-Samra, les églises sorties du sable (1/2)

Du 2 juillet au 1er septembre, l’équipe archéologique de l’École biblique était en séjour à Amman. De cet arrière-poste improvisé, les Frères continuent, chaque été, de trier, dessiner et répertorier le matériel trouvé sur le site de Samra, une fouille achevée en 2009 et dont la préparation d’une deuxième et d’une troisième publications est en cours. Récit d’un chantier qui aura traversé les décennies.

En 1924, les frères Antonin Jaussen op. et Raphaël Savignac op. délaissent leur habituelle caravane d’exploration et traversent pour la première fois les somptueux déserts de Jordanie en voiture pour un voyage dit « épigraphique ». Au nord du pays, près de la frontière syrienne, l’histoire raconte que le fr. Savignac aurait fait arrêter la voiture à la vue d’inscriptions gravées sur des pierres, gisant à même le sol. Les frères explorateurs s’arrêtent et identifient rapidement une puis plusieurs stèles funéraires rédigées en syriaque palestinien (christo-palestinien). Un bédouin de la région en dira « C’est de l’arabe que je ne peux pas lire ». Fr. Savignac en publiera l’analyse dans la Revue biblique de 1925. Les « fouilles » s’arrêtent là pour l’époque, à la surface du sol…

53 ans plus tard, en 1977, Alain Desreumaux, boursier de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres et étudiant à l’École, découvre l’article de 22 pages intitulé Excursion en Transjordanie et au Khirbet es-Samrâ (« la Ruine Sombre » en arabe). C’est à partir de cette trouvaille qu’il orientera son sujet de thèse et retournera sur place, en 1978. Avec le fr. Jean-Baptiste Humbert op., ils présenteront leurs recherches deux ans plus tard à Oxford, à l’occasion d’une conférence des Studies in the History and Archaeology of Jordan (SHAJ). On est alors en mars 1980. Compte tenu de la qualité de la présentation, le Service des Antiquités jordaniennes confie à l’École biblique la responsabilité de la fouille du lieu. Au cours de l’été 1980, le fr. Jean-Baptiste Humbert, chargé de l’archéologie de l’École, clôt les travaux de Tell Keisan en Galilée, et se prépare pour son premier chantier jordanien.

Quatre sondages plus que fructueux

Juillet 1981, les fouilles commencent. On ne connaît alors de Samra que le cimetière repéré par le fr. Savignac et non-loin, les restes d’un fort romain. Les premières heures sont prometteuses : avant de creuser on réalise au cœur de la ruine quatre sondages, quatre carrés de 2 mètres sur 2 mètres éloignés les uns des autres ; les quatre sondages révèlent quatre pavements de mosaïque qui s’avèreront être quatre sols d’églises ! Le projet est lancé, les fouilles s’étaleront sur 28 ans, ralenties et entrecoupées par d’autres chantiers (Mafraq, Amman, Gaza, etc.) et quelques campagnes « en chambre », sans fouilles.

Au cours des huit premières campagnes qui s’enchaînent jusqu’en 1988, on découvre à l’entrée du village de Samra une grande maison romaine dite Mansio, les restes d’une route romaine pavée, un grand bassin romain et une forteresse du IVe siècle, huit églises byzantines datées du VIIe siècle. Les mosaïques nous racontent que la plus ancienne d’entre elles est posée en 610 ap. J.-C. et la plus récente en 649. Il s’agit dans la région de la période de la lente mutation vers l’Islam avant la désertion du lieu, au cours du IXème siècle. Alors que les archéologues de l’équipe, menés par Alain Desreumaux et le fr. Jean-Baptiste Humbert, sont venus chercher les traces d’une communauté christo-palestinienne, ils s’orienteront vite vers un thème plus précis : « Christianisation et déchristianisation de la région ».

Interruptions involontaires

De 1986 à 2002, le fr. Humbert interrompt les fouilles du lieu pour se consacrer à d’autres projets : le palais omeyyade de Mafraq, la Citadelle d’Amman où il découvre un palais néo-assyrien en 1989, puis la restauration du rouleau de cuivre de Qumrân en 1993, confié à la France, et enfin les fouilles de Gaza depuis 1995.

Les fouilles de Samra ne reprennent finalement qu’en 2002 et jusqu’à 2009, quatre campagnes au cours desquelles on découvre trois nouvelles églises ! « On continuerait de fouiller, on continuerait d’en trouver ! » assure aujourd’hui le frère dominicain. Au fur et à mesure des années, ont donc été dévoilées onze églises dont huit à trois nefs et huit pavées de mosaïques, ainsi que du mobilier précieux : un petit autel romain, plus de 300 morceaux de chancels [1], calcaire bitumineux lustré, des chapiteaux en calcaire peints en rouge et des fragments de colonnes de marbre.

Les fouilles ont révélé la vie d’un village byzantin « banal » avec les restes de vases de cuisson, de conservation ou de transport d’aliments, d’huile et de vin, etc. On a dénombré à Samra près de 800 000 tessons dont seuls 3 000 ont été sélectionnés et 2 000 seront publiés. Ce sont notamment ces milliers de morceaux de poterie qui expliquent la lenteur de l’étude au fil des ans.

Le premier volume sur les fouilles a été publié en 1998 sous le titre Fouilles de Khirbet Es-Samrâ en Jordanie, t. 1. La voie romaine, le cimetière, les documents épigraphiques. (Jean-Baptiste Humbert et Alain Desreumaux — Paris Baron Fr. du Fourstraat 8 : Brepols, 1998. — xv+674 p. : 517 figures broché ; 32 x 23 cm. — (Bibliothèque de l’antiquité tardive ; 1).

[1] Clôture basse en bois ou en pierre qui sépare la nef et le chœur d’une église.

Lire la suite : Khirbet es-Samra, les églises sorties du sable (2/2)



RENCONTRE AVEC FRÈRE CYRILLE JALABERT, OP

Le frère Cyrille Jalabert, professeur à l’Ébaf de 2021 à 2023 est aujourd’hui prieur du couvent de Marseille. Il revient dix jours à Jérusalem pour donner un cours et contribuer aux publications.

Dominicain de la province de Toulouse, titulaire notamment d’un doctorat en histoire et d’une maitrise en assyriologie, le fr. Cyrille est un spécialiste du Proche-Orient médiévale. Avant même son entrée dans l’ordre des prêcheurs il passe trois ans en Terre sainte pendant lesquels il découvre Jérusalem et d’autres aspects de la région.

Les étudiants ont pu profiter de son savoir et de sa soif de partager l’histoire de la Jérusalem médiévale. « Mon cours vient compléter dans une perspective historique les cours de topographie pendant lesquels les étudiants découvrent une multitude de sites. Nous avons notamment pris le temps de visiter l’esplanade et d’approfondir la compréhension de l’histoire dont témoigne le patrimoine musulman de la ville. Apprendre à lire et à comprendre le patrimoine dans une perspective historique est un défi plein de saveur que nous avons relevé avec les étudiants. “

 

Frère Cyrille est également venu à Jérusalem pour collaborer avec le laboratoire d’archéologie de l’École. « Nous travaillons ensemble à la publication de recherches archéologiques sur Khirbet Samra , un site romano-byzantin de Jordanie. C’est un travail de longue haleine ; un travail d’équipe. La publication a pris du retard et venir sur place était un bon moyen de faire avancer les choses ! » C’est une vraie joie, pour l’historien qu’est le frère Cyrille, de consacrer du temps à ce site qui est “une capsule temporelle de plusieurs époques que nous pouvons dater ! C’est rare dans cette région ou les sites et les époques s’entremêlent. Par exemple, nous pouvons affirmer très précisément que les poteries sont de 150-300 après JC. Cela apporte un éclairage intéressant pour dater tout un ensemble d’autres sites dans la région. » Un travail de recherche qui lui tient à cœur : “Je continue à travailler dessus depuis Marseille en apportant un regard de lecteur aguerri sur ces travaux.”

Arabophone et très attaché à la région, le fr. Cyrille  attendait ce séjour avec impatience malgré la guerre qui se poursuit : “Je ne cache pas que j’apprécierai de revenir un jour à Jérusalem ! J’ai tissé des liens forts lors de mes années en Terre Sainte et suis très attaché aux habitants et à la culture d’ici. Six mois après être parti et quatre mois après le début de la guerre, à la fois rien n’a changé mais tout a changé. L’ambiance de la ville n’est pas la même, il peut y avoir de la peur et de la défiance entre les gens. Mais cela fait du bien de venir à Jérusalem pour quelques jours et d’aller de l’avant”.




JORDANIE : 100 000 TESSONS ET UN OSTRACON ARAMÉEN

Dans la brochure de l’Institut Français d’archéologie du Proche-Orient de 1989, les fouilles de Khirbet Es-Samra sont introduites ainsi : «  Le programme de recherches a été mené à Samra avec le souci de tracer l’évolution du christianisme dans un petit bourg du nord de la province d’Arabie. » L’entreprise y avait vu le jour en 1977, 53 ans après les découvertes d’inscriptions du Père Savignac de l’École biblique.

Extrait des archives

Les années ont passé, et le quotidien des frères a bien changé. Les campagnes de fouilles se sont achevées, maintenant place à l’étude et à la publication.

Depuis dix ans, pendant les mois d’été, Jean-Baptiste et Jean-Michel réunissent leur équipe de chercheurs. Les conditions sont moins spartiates, fini les nuits à même le sol, le manque d’électricité et d’eau courante, la chaleur écrasante et la cohabitation avec les scorpions !
Leur engagement, leur passion pour presser le jus des travaux de terrain et la volonté de faire avancer la recherche sont, en revanche, toujours au rendez-vous !

Un des événements de l’été 2023 est la fin du tri du vrac des travaux sur la Citadelle d’Amman, accumulé depuis 1994 ! Cette année, pas moins de 100 000 tessons ont été examinés un par un, avec la précision  d’un horloger suisse !
“La récompense  de la campagne fut la trouvaille d’un ostracon de calcaire inscrit en araméen du 5° siècle avant J.-C.”

Analyse de tessons, été 2023



LES ABEILLES DE SAINT-ÉTIENNE VOUS SOUHAITENT UN BON ÉTÉ

L’École Biblique et le couvent Saint-Étienne ont pris le rythme estival : peu de frères dominicains à Jérusalem ; les archéologues sont à Amman, travaillant à la publication de diverses fouilles de Jordanie (Samra, citadelle) ; d’autres frères sont en vacances mais soeur Martine est fidèle à son poste travaillant dur sur les dossiers de visa des étudiants attendus en octobre. Quant à nos abeilles, elles butinent sans relâche et nous préparent un délicieux miel pour la rentrée.

Bonnes vacances à tous.



Souvenirs, souvenirs… Mémoires de Jérusalem (partie 1)

Vendredi 6 mars dernier, l’École biblique était à l’honneur à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres : le colloque « Le goût de l’Orient » rassemblait des membres des deux institutions à l’Institut de France pour célébrer le centenaire de la reconnaissance de l’EBAF comme École archéologique française. Parmi les orientalistes précédents, six anciens boursiers de l’AIBL venus témoigner de leur(s) année(s) académique(s) passées à l’EBAF.

Retrouvez dans ce premier article le discours de Claire Balandier, archéologue, maître de conférences en histoire ancienne du monde grec à l’Université d’Avignon, archéologue, membre de l’UMR 8210 AnHiMA (Anthropologie et histoire des mondes antiques), directrice de la Mission archéologique française à Paphos (Chypre) et Guillaume Bady, patrologue, chargé de recherche au CNRS, membre de l’UMR 5189 HiSoMA (Histoire et Sources des Mondes Antiques), directeur de l’Institut des Sources Chrétiennes.

Discours de Mme Claire Balandier

Monsieur le Secrétaire Perpétuel, Monsieur le Président, Monsieur le Directeur, chers collègues, chers amis,

c’est un véritable honneur pour moi de représenter l’ensemble des boursiers de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres à l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem dans le domaine de l’archéologie.

Si la majorité des boursiers sont venus à Jérusalem pour réaliser leur thèse de doctorat, j’étais déjà docteur quand j’ai eu le privilège d’être choisie par l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres pour venir effectuer une recherche post doctorale à l’EBAF en 2002/2003. J’avais déjà eu un avant- goût de l’Orient à Chypre où j’étais assistante de fouilles depuis 1990 sur le chantier de l’École Française d’Athènes sur l’enceinte de la cité-royaume d’Amathonte et où j’avais réalisé ma thèse sur les fortifications et la défense des territoires de l’île de l’époque archaïque aux invasions arabes (VIIIe siècle av. J.-C.-VIIe siècle de n. è.). Dans le prolongement de cette recherche, il était logique de s’intéresser alors au Levant voisin, la Syrie-Palestine d’Hérodote, Transeuphratène des Perses achéménides et Syrie-Phénicie des Ptolémées.

Lorsque je suis arrivée à Jérusalem en octobre 2002, je me souviens encore de la lumière, des sons et des parfums qui m’ont enivrée au premier matin lorsque j’ai passé le portail de l’École pour me rendre porte de Damas, découvrir la vieille ville de Jérusalem. L’impression qui m’a saisie fut indescriptible: bien que j’ai vécu plus de deux ans dans la vieille ville de Nicosie, qui m’avait habituée aux cris et à l’agitation d’un marché oriental, aux appels à la prière des muezzins avec lesquels rivalisaient les cloches des églises de toutes obédiences, aux graffiti politiques sur les murs anciens que dissimulaient jasmins et bougainvillées, au passage de soldats en armes et de groupes de touristes peu concernés par le fait de traverser une ville coupée en deux… tout, à Jérusalem, était plus accentué… et il en était de même pour les émotions ressenties, que ce soit l’enthousiasme dans la découverte de lieux mythiques et historiques comme le découragement moral face aux difficultés quotidiennes que subissaient chaque jour les Palestiniens du quartier et le personnel de l’École, bloqués aux “check-points” (il n’y avait pas encore de mur de séparation entre Israël et la Cisjordanie): en effet, très vite, la réalité a pris le dessus sur l’émerveillement; nous étions en pleine deuxième Intifada, la tension était palpable. En dehors de la possibilité de soutenir les “femmes en noir”, et aussi quelques hommes, laïcs et religieux de toutes religions, qui manifestaient chaque vendredi midi, place de France, leur désir de paix et leur opposition à la colonisation et à l’occupation des Territoires palestiniens, le sentiment pénible d’impuissance, le risque potentiel d’attentats et l’impossibilité de circuler librement nous a contraints à demeurer plus que nous ne l’aurions souhaité entre les murs, sécurisants, de l’EBAF. Egoïstement, il faut reconnaître qu’il y avait pire comme lieu de confinement et que cela fut loin d’être désagréable…

Comme tous les boursiers, j’ai ainsi suivi une série d’enseignements, tous plus passionnants les uns que les autres. Arrivée avec une formation d’historienne et d’archéologue, j’ai été particulièrement sensible à l’enseignement pluridisciplinaire, inestimable, dispensé à l’EBAF par des enseignants-chercheurs dominicains biblistes, historiens, philologues, archéologues, qui m’ont permis d’affiner la méthode historique que j’avais apprise à l’Université, grâce aux cours d’exégèse biblique de Francolino Gonçalvès sur les livres des Rois ou à ceux d’Étienne Nodet sur les livres des Maccabées, aux cours de rhétorique de Paolo Garuti, mais aussi à m’initier à l’assyriologie grâce à Marcel Sigrist, aux études qumraniques d’Emile Puech, à l’arabe littéraire enseigné par Krzysztof Modras, etc…. Surtout cette étude des textes, qui aurait pu être effectuée n’importe où, prenait une autre dimension en étant complétée par une étude des sources archéologiques, sur le matériel même issu des fouilles conduites par l’École ou dans les musées de Jérusalem au Musée de la Palestine (Rockfeller) ou au Musée d’Israël, enfin par l’approche topographique des lieux historiques. Je garde ainsi un souvenir exceptionnel des cours de topographie urbaine de Jerry Murphy O’Connor dans la vieille ville de Jérusalem et de ceux de Jean-Baptiste Humbert et des discussions passionnantes conduites au “Musée”, le bâtiment, qui, au fond du jardin de l’École, lui sert de laboratoire de recherches. La plupart des boursiers en archéologie ont eu la chance de participer aux recherches archéologiques conduites par l’École, longtemps à Tell Keisan, à la citadelle d’Amman ou Khirbet es-Samra en Jordanie, à Gaza. Lorsque je suis arrivée, à l’automne 2002, Jean-Baptiste Humbert travaillait dans la bande de Gaza, sur le site de Chati, au sauvetage d’une maison hellénistique dont le bas des murs épargnés par les bulldozers étaient décorés d’enduits peints aux couleurs contrastées, jaune, noire, rouge. La fermeture du check point de Gaza a brusquement interrompu ce chantier et a fait avorter le projet de repérage du tracé de l’enceinte classique de la ville antique que Jean-Baptiste Humbert souhaitait que nous réalisions : je garde un souvenir particulier de la matinée que nous avons passée à marcher, le long des dunes qui recouvraient les vestiges, pris en étau entre l’accroissement des camps de réfugiés et l’érosion marine. Je regrette de n’avoir pu être présente lorsque, en 2005, la reprise des travaux a permis de mettre au jour une porte de l’enceinte de la ville romaine et, sous ce niveau, celle d’époque hellénistique.

Les voyages à travers la région sont un autre élément fondamental de la formation offerte par l’École aux boursiers. D’une durée d’un à plusieurs jours, ils ont pour objectif de découvrir les paysages et les sites, évoqués par les textes bibliques et historiques. Se retrouver ainsi sur les pas des voyageurs qui nous ont fait rêver à l’Orient, tels que Chateaubriand, Renan, Lamartine et autres Pierre Loti, mais surtout dans les pas des pères Jaussen et Savignac, Abel, mais aussi de Marcel Baudry (que nous n’eûmes pas l’honneur de connaître, en raison de sa disparition prématurée et douloureuse, mais dont les pères et les anciens élèves ne cessaient d’évoquer le souvenir), il s’agit là d’expériences uniques : malgré la situation politique difficile, il avait ainsi été possible de se rendre sur les sites d’Arad, de Beersheba, et voir les villes byzantines du désert du Négueb et le cratère de Ramon, au bord de la mer morte, à Qumran, Aïn Feshkha et Massada, sur la côte, à Dor, Césarée, Saint-Jean-d’Acre, dans la vallée du Jourdain à Scythopolis et en Idumée à Lakish (Tell ed-Duweir). Je garde une émotion particulière de la randonnée dans le Wadi Qelt, du monastère Saint-Georges à Jéricho et dans le désert de Judée : marcher et dormir à la belle étoile, comme nos illustres prédécesseurs, au cœur d’une nature extraordinaire, face aux éléments, nous laissaient imaginer les expéditions qu’ils avaient conduites dans ces endroits longtemps reculés, qui nous permettaient d’oublier à la fois la civilisation contemporaine qui transforme, inexorablement, la vie traditionnelle des bédouins, mais aussi d’oublier les tensions politiques et militaires.

En revanche, il ne nous fut pas possible de nous rendre en Cisjordanie, en raison du bouclage des Territoires sous autorité palestinienne par l’armée israélienne. Ceci semblait compromettre la recherche que je devais conduire sur les fortifications de cette région, car les études de terrain étaient devenues impossibles. C’est donc surtout en bibliothèque que j’ai passé ma première année de recherches, soulagée de trouver là toutes les revues archéologiques et grandes collections que je ne pouvais consulter en France, notamment tous les rapports de fouilles jordaniens, palestiniens, israéliens, etc. La deuxième année, j’ai pu plus aisément travailler sur le terrain pour ma recherche conduite plus à l’Est, de l’autre côté du Jourdain, qui, pour les époques qui m’intéressaient, n’était pas une frontière mais une artère de circulation et de communication.

J’ai ainsi eu la chance que le conseil scientifique de l’École comme l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres veuillent bien accepter mon projet de réaliser un mémoire de deuxième année sur les fortifications de Transjordanie, ce qui me valut donc de passer une deuxième année à l’EBAF en 2003/2004. Celle-ci conforta aussi mon désir d’enseigner, de transmettre le goût de l’Orient et de la recherche. En effet, comme j’avais guidé des voyages en Grèce les années précédentes, le directeur de l’École d’alors, Jean-Michel Poffet, m’a proposé de prendre en charge les voyages de l’École et a accepté bien volontiers que je fasse précéder ceux-ci de cours de présentation historique et archéologique des sites que nous allions visiter, afin que ceux qui les découvraient pour la première fois puissent en tirer le meilleur bénéfice. J’ai beaucoup apprécié ces riches moments de rencontres, d’échanges culturels et humains.

Il nous est demandé si le passage par l’EBAF a eu un rôle dans notre carrière professionnelle. C’est indéniable. Mon entrée dans la carrière universitaire en a été facilitée (il m’a été clairement exprimée que plusieurs membres de la commission de recrutement de l’Université d’Avignon, où j’ai été recrutée comme Maître de Conférences en Histoire ancienne du monde grec, avaient été sensibles au fait que j’étais diplômée de l’EBAF, grâce aux deux mémoires que j’avais pu y réaliser et qui avaient été présentés au conseil scientifique de l’École comme à l’Académie). De même, la réalisation de mon Habilitation à diriger des Recherches a été facilitée par l’approfondissement de ces mémoires; un passage d’un mois à l’École, en janvier 2011, m’a permis de me rendre sur les sites de Cisjordanie dont l’accès était désormais possible, en dépit du mur érigé depuis que j’avais quitté l’École en juillet 2004.

Je suis très reconnaissante à Francolino Goncalvès, alors responsable des publications, d’avoir accueilli cette étude dans la nouvelle série de la collection des Etudes Bibliques. Ce dernier, dont la disparition récente nous a beaucoup peinés, avait répondu positivement à mon invitation à venir parler de ses travaux d’exégèse au séminaire de recherche de l’Université d’Avignon. Je me souviens encore de son enthousiasme à expliquer sa méthode à propos de la conquête néobabylonienne de Judah et des yeux brillants de l’auditoire. A priori, la mission archéologique française que j’ai pu fonder à Paphos, en 2008, grâce au soutien du Département des Antiquités de Chypre et de la Commission consultative pour la recherche archéologique à l’étranger du Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères n’avait pas de rapport avec l’EBAF. Et pourtant, d’anciens boursiers y ont participé comme fouilleurs ou sont aujourd’hui nos partenaires, polonais, dans le cadre d’un projet quadriennal financé par un programme européen (Horizon 2020) et des professeurs de l’École sont venus nous y visiter et participer aux deux premiers colloques internationaux consacrés à ce site en Avignon en 2012, puis à Paphos même en 2017. Nous nous sommes aussi retrouvés, lors de récentes rencontres scientifiques organisées par le Cyprus Research Institute à Nicosie, rassemblant les représentants des Écoles et Instituts archéologiques français œuvrant en Méditerranée orientale. En effet, être boursier à l’École ce fut aussi cela, nouer des liens intellectuels et amicaux inégalables, avoir la chance de côtoyer des chercheurs de tous horizons et notamment les plus âgés des dominicains, tels que le père Emile Boismard ou François Langlamet, mémoire de l’École, qui avaient plaisir à partager avec nous, à table, leur passion pour leurs recherches, leurs doutes aussi parfois, les souvenirs de “leur” Palestine et de “leur” Orient, leurs enthousiasmes et aussi leurs désillusions, leurs espoirs.

Pour conclure, en bref, je dirai qu’être un(e) ancien(ne) boursier(ère) de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres à l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem c’est appartenir, en définitive, à une véritable confrérie scientifique et humaine.

Claire Balandier

Discours de M. Guillaume Bady

Monsieur le Secrétaire perpétuel,

Monsieur le Président,

Monsieur le Directeur,

Mesdames et Messieurs,

C’est un honneur pour moi d’être appelé à représenter en quelque sorte, parmi les boursiers de l’École biblique, la patristique, à savoir l’étude des Pères de l’Église ou des auteurs chrétiens des premiers siècles, en ce lieu où j’ai gardé un vif souvenir de la manière dont M. Jean Leclant m’a reçu à l’époque. Je tiens également à évoquer également ici M. Antoine Guillaumont, qui avait écrit un rapport, très important pour moi, sur le mémoire que j’avais rédigé.

J’ai été boursier de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres en 1997-1998 et élève de l’École biblique, à l’époque où le P. Claude Geffré en était le directeur. Étudiant en lettres classiques, je travaillais sur certains Pères grecs. N’étant point du tout archéologue, recoller des tessons n’était donc a priori pas mon fort, mais le décalque, à l’encre, de mosaïques pour Jean-Baptiste Humbert m’a notamment permis de constater qu’un mosaïste antique pouvait réaliser un chef d’œuvre sans rien comprendre des lettres grecques qu’il recopiait – ou plutôt qu’il imitait comme si c’étaient des animaux exotiques. Mais c’est là le moindre des acquis de cette année. « Qu’aura de plus celui qui s’est rendu » à Jérusalem ? demandait en effet Grégoire de Nysse déjà au IVe siècle[1]. Le Cappadocien, même s’il était choqué par les mœurs de Jérusalem et désabusé après ses déboires sur place, n’en pose pas moins une bonne question.

Pour moi cette année a été très positive, et même décisive, je m’y suis fait beaucoup d’amis – et pourtant j’y ne suis jamais retourné. D’une part, les moments passés en compagnie de personnes en uniforme à l’aéroport ou ailleurs, tout comme les attentats répétés contre les civils, m’ont donné envie de ne plus jamais revivre ça ; d’autre part, j’ai découvert en rentrant en France à quel point la paix, le fait de respirer dans un pays qui n’est pas continuellement en guerre, pouvait être une sensation physique absolument inestimable. La première chose que cette année à l’École biblique m’a apprise, c’est donc le sens, contrasté et concret, de la paix, ainsi que l’exemple d’une Jérusalem cristallisant bien des conflits, mais abritant aussi la plus grande diversité, la plus étonnante cohabitation religieuse que j’aie jamais vue.

Avec la géopolitique, qui n’était pas au programme en tant que telle, c’est évidemment la géographie dite biblique que, de manière à la fois critique et vivante, l’École biblique m’a fait découvrir, avec Marcel Beaudry pour guide. Impossible de lire la Bible comme avant, sans que des images, des odeurs, mille impressions ne surgissent au détour des pages.

La Bible étant au cœur des textes patristiques, Monique Alexandre, à la Sorbonne, m’a vivement conseillé, comme elle le faisait régulièrement à ses étudiants, d’aller à l’École biblique. Et cela m’a tellement plu qu’à la fin de l’année, encouragé par Émile Puech, j’ai même pensé m’orienter plutôt du côté des recherches sur Qumran – avant que les Pères me rattrapent et que je sois recruté comme chercheur au CNRS, affecté à l’UMR HiSoMA, Histoire et Sources des Mondes Antiques, plus précisément aux Sources Chrétiennes, à Lyon, où je travaille toujours. Je n’en ai pas moins gardé une sorte de tropisme. Récemment un collègue me faisait remarquer – je ne m’en étais pas paerçu moi-même – que toutes mes recherches tournaient autour de la Bible. Le Commentaire sur les Proverbes attribué à Jean Chrysostome, le texte lucianique de la Septante, l’enseignement, depuis plus de 15 ans, à l’Institut Catholique de Paris sur la Bible grecque – malheureusement le seul cours d’intiation qui existe nommément là-dessus en France –, l’introduction et la traduction annotée du 3e Esdras dans la nouvelle Traduction Œcuménique de la Bible, quelques recherches sur les divisions anciennes du texte de l’Ancien Testament… Et je ne peux pas ne pas citer le projet Biblindex, dirigé par ma collègue Laurence Mellerin : cet index en ligne des références bibliques chez les auteurs chrétiens des premiers siècles, hérité des données du Centre d’Analyse et de Documentation Patristique de Strasbourg. La base de données comporte – le fait est significatif venant de patrologues – une concordance fine de 12 bibles. Biblindex motive aussi la tenue mensuelle d’un séminaire depuis bientôt 10 ans, dont les communications sont publiées dans les Cahiers de Biblindex au sein des Cahiers de Biblia Patristica ; Olivier-Thomas Venard est venu y parler et, depuis l’an dernier, il se réunit régulièrement dans le but, précisément, de fournir l’annotation patristique de l’Ecclésiaste pour le rouleau de la Bible En Ses Traditions.

Pour moi, il y a là un juste retour des choses, mais aussi la conviction que cette façon d’étudier la Bible, non pas en la lisant simplement telle qu’elle apparaît aujourd’hui, ni en cherchant un original hypothétique, mais en s’intéressant à son sens dans l’histoire, dès l’antiquité, est plus que jamais légitime. Le succès des Lectures de la Bible du ier au xve siècle, ouvrage collectif paru en 2017 sous la direction de Laurence Mellerin, le manifeste bien. Et cet ancrage dans l’histoire – sans parler des témoignages inestimables pour l’histoire du texte – n’est pas le seul intérêt des écrits patristiques et médiévaux pour la Bible. À mon avis, les traditions patristiques permettent aussi d’opérer un rééquilibrage et une réorientation : un rééquilibrage du côté du judaïsme et de l’Ancien Testament, qui par rapport à notre époque était beaucoup plus cité par les Pères que le Nouveau (encore aujourd’hui, si d’ambitieux projets visent à un recensement exhaustif des leçons patristiques du texte néotestamentaire, seule une poignée de courageux s’attelle à l’édition de la Septante), et une réorientation plus décomplexée vers un sens actualisé des Écritures, c’est-à-dire non plus seulement à partir d’un Urtext plus ou moins fantasmatique, mais parce que l’actualisation a toujours fait partie du texte lui-même.

Ce centenaire de l’École biblique n’est-il pas une occasion rêvée de rendre plus que jamais actuelle l’étude de la Bible qui est l’origine et la visée même de sa création ? Car je le dis aujourd’hui avec une immense reconnaissance : l’École biblique a contribué à me rendre la Bible actuelle, et même, en quelque sorte, sans fin.

Guillaume Bady

[1] Lettre 2, 8, trad. P. Maraval, SC 363, p. 115.



Un été studieux à Amman pour nos archéologues

Comme chaque été depuis plusieurs années, nos archéologues se sont installés à Amman début juillet pour deux mois de travail intensif, en vue de préparer la publication de fouilles faites en Jordanie au cours des années passés. Après plusieurs étés consacrés à travailler sur le site de Samra, le fr. Jean-Baptiste Humbert et son équipe travaillent cet été sur les fouilles de la citadelle d’Amman réalisées par l’Ecole biblique entre 1988 et 1994.

Plusieurs collaborateurs spécialisés se sont joints au fr. Jean-Baptiste, grâce au fr. Jean-Michel de Tarragon, photographe de l’équipe et chargé de toute la logistique de ces deux mois d’été studieux. Nous nous réjouissons déjà de la belle publication qui en sortira.