Premier volet d’une longue série cet été, (re)découvrez les profils des chercheurs venus étudier à l’ÉBAF en 2024-2025 : apprenez-en plus sur leurs parcours, leurs motivations et leurs recherches.
Peux-tu te présenter ?
Je m’appelle Hyacint ULLMAN, je viens de la République tchèque, je suis rentré chez les dominicains en 2008 avant d’être ordonné prêtre en 2016. J’ai fait mon noviciat à Olmutz, la suite de ma formation à Bordeaux et de 2009 à 2015 j’étais à la province de Toulouse. Je suis revenu au pays où j’ai fait aumônier au lycée archiépiscopal pendant huit ans, au bout desquels j’ai effectué un premier séjour à l’ÉBAF.
Pourquoi l’ÉBAF ?
Grâce à mes études en France j’ai eu une expérience de la culture et de la langue française. C’est exceptionnel d’être ici, de pouvoir visiter tous les lieux, les cours d’archéologie et de topographie, également la bibliothèque et le savoir partagé par les professeurs, c’est super. Mon provincial était d’accord pour que je puisse venir à à l’ÉBAF.
Quel est ton projet académique ?
Je vise un approfondissement de la parole de Dieu, des études plus poussées, je suis là pendant deux ans pour obtenir le diplôme de l’école, préparer le baccalauréat puis la licence en science biblique à Rome à la commission biblique pontificale. C’est une institution qui publie des textes sur la bible dont les auteurs sont nommés par le Pape. Nous sommes plusieurs à l’ÉBAF à préparer cet examen.
Qu’as-tu découvert en venant à l’ÉBAF ?
La première fois était il y a cinq ans, j’étais alors venu avec un petit groupe d’amis qui fréquentait la messe de la basilique Saint Étienne. Ce qui m’a surpris est que tout est neuf ! Il y a eu de grands travaux de rénovation. Je suis très content d’être dans cette communauté fraternelle, qui se réunit plusieurs fois par jours pour prier ensemble. Ce qui est très bien est de pouvoir travailler avec ceux qui vivent à l’ÉBAF, non seulement les frères mais aussi les étudiants avec qui il y a une super ambiance.
Avant d’arriver je ne connaissais personne et je ne savais pas comment les choses iraient, alors je me réjouis de cette découverte. J’aime beaucoup les sorties topographiques, c’est inédit pour moi.
Photo : ÉBAF, Ordo Prædicatorum. Fr. Hyacint explique le site de Mamshit, dans le Néguev.
Quelles sont les forces de l’ÉBAF selon toi ?
Assurément sa bibliothèque et son emplacement. Je passe beaucoup de temps à ma table d’étude, bien que chaque jour je veille à marcher une heure, je vais en ville visiter les lieux saints par exemple. C’est important de sortir suffisamment. Je prépare un travail pour la fin d’année académique à la bibliothèque. Je me suis lancé sur l’étude du Psaume 91, qui commence par « Qu’il est bon de rendre grâce au Seigneur, de chanter ton nom, Dieu Très-haut » qui exprime la confiance en Dieu. À la bibliothèque j’étudie des amulettes qui auraient été utilisées pour combattre des démons par des juifs et ensuite des chrétiens. Je cherche à savoir si elles ont vraiment existé et quel était leur but.
Tu étudies sur un site archéologique et un lieu saint, que cela te fait-il ?
D’une certaine manière je suis habitué à vivre près de lieux saints. En effet nous sommes tout proches des débuts du christianisme, mais aussi du père LAGRANGE en cause de béatification. Nous cherchons la vérité par la bible et l’amour de Dieu. Cette communion vivante avec ceux qui habitent et ont habité le couvent dépasse tout ce qu’on peut voir avec les yeux : il y a aussi les yeux de la foi. Ici, à l’endroit du martyr de St Étienne, nous avons célébré trois fois la Toussaint dans la même semaine.
Comment concilies-tu la raison et la foi ?
On fait confiance en Dieu et tout ce qu’il nous a révélé en Jésus. La prière, l’oraison et le chapelet chaque jour nourrissent l’esprit, encore plus à Jérusalem en visitant les lieux saints. Cela m’amène à vouloir en savoir plus sur Dieu et mieux le connaître. Les études et la connaissance intellectuelle alimentent l’amour que je porte à Dieu ; c’est tout l’objet de la Bible. On apprend aussi les langues anciennes. On est toujours contents avec une parole vivante de Dieu, qui nous transforme.
Je ne distingue pas raison et foi, au contraire, je les associe. Ce sont les deux jambes d’un seul corps, il n’y a pas l’un sans l’autre.
Que signifie Terre sainte pour toi ?
J’ai l’impression qu’il y a plusieurs niveaux de Terre sainte. Pour commencer j’ai envie de dire que la Terre entière est sainte par la venue de Jésus : tout homme, tout pays est touché par la grâce de Dieu qui est source d’existence. Je l’ai expérimenté dans ma vie dominicaine en ayant changé de couvent, en revenant dans ma petite ville en Tchéquie… Dieu est omniprésent. C’est une région marquée par la politique, les trois religions abrahamiques, chacune avec ses sous-divisions. Passer la ligne de tramway revient à changer de monde, les quartiers n’ont rien à voir les uns avec les autres. Jérusalem est une multiplicité de mondes. On pourrait aussi parler de Tel Aviv ou encore Jéricho qui sont complètement différents : de la Méditerranée au Jourdain ce n’est pas la même chose. Plus simplement, j’ai envie de découvrir la Terre sainte parce qu’il y a cinq ans je n’ai pas eu le temps de tout faire. Chaque visite est l’occasion de porter un regard nouveau.
Photo : ÉBAF, Ordo Prædicatorum. Le frère Hyacint prêche à la chapelle du Mont Nébo, en Jordanie.
Ton séjour à Jérusalem change-t-il ta vision de la Terre sainte ?
Il y a cinq ans, je ne savais pas à quoi m’attendre. J’avais une image des montagnes de Judée, de la dépression jordanienne, cependant en lisant la bible on se fait déjà une petite idée des lieux.
Que dirais-tu à quelqu’un qui voudrait étudier à l’ÉBAF ?
C’est une très bonne idée, il ne faut pas avoir peur de l’inconnu, de la distance, de la situation – cela vaut la peine de venir. Il faut en faire l’expérience.
Quel message donnerais-tu à nos bienfaiteurs ?
Merci beaucoup ! C’est unique ce que l’École fait. L’école maintient son programme avec ses chercheurs, boursiers, prêtres… peu importe les raisons de leur venue. C’est une communauté unique où l’on confronte le texte biblique et son contexte, cela vaut le coup de soutenir les efforts de l’ÉBAF qui est comme une bulle en ces temps de guerre.