Comme chaque année depuis que l’École existe, le cours de topographie et d’histoire du Proche orient ancien emmène les étudiants au coeur de la Jordanie pour une semaine d’étude des plus célèbres sites archéologiques. Alexandra de Varax, assistante du frère Cabaret, nous en raconte le parcours 2017.
Après un an d’apprentissage de l’archéologie de la Terre sainte, le voyage en Jordanie s’inscrit comme l’étape ultime. Accompagnés par le frère Dominique-Marie Cabaret op. nous remonterons tout le pays d’Aqaba, tout proche de l’Arabie saoudite, jusqu’à Umm Qais aux portes de la Syrie.
L’ombre du grand Lawrence d’Arabie plane encore sur Aqaba et la région désertique du Wadi Rum où se dressent, majestueux, les sept piliers de la sagesse. Après ce premier aperçu des paysages de Jordanie c’est Pétra qu’on commence à discerner. D’abord de fines feuilles d’acanthe pressées entre les deux parois du Siq puis une corniche, Isis portant une corne d’abondance et nous voilà face au Khazneh, le Trésor de la capitale nabatéenne. Face à une telle prouesse architecturale, nous nous rêvons de nouveaux Burckhardt, premier découvreur européen de la cité.
La rencontre avec Thibaud Fournet, archéologue de l’IFPO en Jordanie, finit de nous faire comprendre l’exploit que représente cette cité en plein désert où bains et thermes se trouvent en nombre, approvisionnés par un système complexe de canalisations et de citernes. Une fois quittée Pétra nous visitons Machéronte lieu de la danse de Salomé, le palais hellénistique d’Iraq-el-Emir et la citadelle d’Amman. Au Krak de Montréal, actuelle Shoback ce sont des chevaliers croisés revêtus de cottes de maille et de heaumes bientôt remplacés par califes ayyoubides, sultans mamelouks et cheiks ottomans qui se dessinent entre les voutes encore dressées et les chapiteaux brisés.
A Umm al-Rasas c’est l’hoplite romain que l’on cherche à observer derrière les murs du castrum et le clerc byzantin remontant la nef de l’une des trois églises pavées de mosaïques. Moïse et les douze tribus d’Israël reprennent vie lors de notre halte au mont Nebo. Nous observons enfin les splendeurs de Madaba et la fameuse «carte» dans l’église Saint-Georges où se distingue le cardo à colonne de Jérusalem. Malheureusement, ici comme pour les autres mosaïques de Madaba, un courant iconophobe a endommagé toutes les mosaïques en effaçant les visages humains et les figures animales.
L’épopée s’achève sur les villes de la décapole, Jérash et Gadara qui ne nous laissent pas de marbre avec leurs allées à portique et leurs théâtres où l’on ne se prive pas de s’essayer au chant lyrique, et à l’ode romantique des ruines. Gabriel Humbert, le frère du fr. Jean-Baptiste Humbert, nous reçoit avec sa célèbre prodigalité et sa loquacité unique, nous narrant avec emphase et humour les visites des officiels français. Toutes ces étapes nous ont permis de retrouver les lieux d’études des pères dominicains, inscriptions nabatéennes et araméennes, relevés architecturaux, fouilles… Nous comprenons mieux la cohérence de cette Terre sainte qui s’étend bien jusqu’outre Jourdain.